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Côme : Les enfants migrants non accompagnés sont livrés à eux-mêmes

Depuis le début de l’été, de nombreux migrants sont refoulés à la frontière suisse-italienne et se retrouvent bloqués dans la petite ville de Côme, en Italie.

Terre des hommes, conjointement avec le Service Social International (SSI-Suisse) et Tdh Italie, s’est rendue à Côme quelques jours précédant l’ouverture du camp de containers. Nous avons pu interroger plusieurs jeunes, ayant trouvé refuge dans deux paroisses : Don Guanella et Don Giusto.

Tous racontent avoir tenté de passer la frontière plusieurs fois. Le résultat est toujours le même : à Chiasso, les gardes-frontières leur posent des questions – sans présence aucune d’interprète rendant la communication difficile et surtout imprécise quant à la situation du mineur en question ; ils leur infligent ensuite une fouille corporelle complète, mettant à mal la dignité physique de ces jeunes filles et garçons ; puis les renvoient en Italie, soit vers Côme soit vers Taranto, un centre d’enregistrement pour les migrants au sud de l’Italie.

Ali, 15 ans :

Orphelin de père, Ali a quitté sa ville natale au sud de l’Ethiopie, laissant derrière lui sa mère, ses deux jeunes sœurs et son grand frère. Il a grandi à la campagne et a toujours vécu dans une grande précarité. Il n’a jamais été à l’école. Les larmes aux yeux, il évoque sa famille puis nous confie pourquoi il est parti : « Je veux étudier, je veux devenir quelqu’un, je veux aider ma famille. »

Cela fait cinq jours qu’Ali vit dans la paroisse Don Guanella. Transformée en centre d’accueil provisoire, une quinzaine de mineurs non accompagnés y sont logés et nourris. Ils bénéficient également de cours d’alphabétisation et d’italien dispensés par les paroissiens. « Au début je n’avais pas envie d’y aller, mais maintenant j’aime bien être là. Surtout, je n’ai pas d’autres endroits où aller. » raconte-t-il.

Ali ne sait pas ce que l’avenir lui réserve. Cela n’a rien d’étonnant puisque le jeune garçon n’a reçu aucune information sur ses droits ou sur les procédures d’asile. Nous avons rencontré d’autres cas similaires à celui d’Ali. Les besoins de base des mineurs sont actuellement couverts mais ils ne sont pas bien – voire pas du tout - informés sur leurs droits en matière de migration.

C’est le cas de ces deux jeunes filles Ethiopiennes, de 15 et 16 ans : Amies d’enfance, elles ont fui ensemble leur pays et ont traversé l’Erythrée, le Soudan puis la Lybie. Elles sont arrivées en Italie il y a deux semaines et logent maintenant dans la paroisse de Don Giusto. Les deux amies ont tenté de rejoindre la Suisse mais elles ont été refoulées. Elles évoquent une mauvaise expérience avec les gardes-frontières, sans plus de détails. Tout comme Ali, elles n’ont reçu aucune information sur leurs droits.

L’Alliance pour les droits des enfants migrants (ADEM – Tdh, SSI, IDE, OSAR) réitère l’importance du respect de l’intérêt supérieur des enfants migrants et des mineurs non accompagnés dans leur prise en charge et dans les procédures de demande d’asile. Les mineurs séparés de leur famille ont des besoins spécifiques et nécessitent un encadrement adapté. Une analyse juridique menée par l’OSAR, membre de l’ADEM, dénonce le renvoi des mineurs non accompagnés en Italie par les autorités suisses. Selon la loi fédérale sur les étrangers, la Suisse est tenue de garantir que les enfants renvoyés soient remis à un membre de leur famille, à un tuteur ou à une structure d'accueil pouvant garantir leur protection dans l'Etat concerné. Cette protection n’est pas respectée lorsque les mineurs sont simplement remis aux autorités Italiennes. Certains mineurs non accompagnés possèdent également des membres de leur famille dans un pays européen, qu’ils doivent pouvoir rejoindre en vertu des accords Dublin en vigueur.

Moins visibles mais toujours présents : n’oublions pas les mineurs non accompagnés de Côme

Crédit photos: Sandro Mahler